
Être un doctorant au Maroc d’aujourd’hui (Tribune)
Le 10 octobre 2024, «eLife», une organisation indépendante à but non lucratif qui œuvre à améliorer la façon dont les travaux de recherche sont examinés et communiqués, a publié un article intitulé «Being a PhD Student in Morocco Today» (1), écrit par Anas Bedraoui, doctorant à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P). Ce témoignage transcende l’expérience individuelle et offre, à travers un mini sondage, un regard «lucide» sur les défis et les espoirs des doctorants marocains. Entre frustrations et réussites, il reflète un Maroc en pleine progression, porté par l’ambition de sa jeunesse scientifique. Cette initiative suscite beaucoup de réflexion quant à la vie doctorante au Maroc.
Par Malak Fakhri, doctorante à l’Université Mohammed VI des sciences et de la santé, membre de American society of Microbiology.
Malgré son prestigieux héritage, dont témoigne notamment l’Université Al-Qarawiyyin, la plus ancienne au monde, le Maroc fait face à des défis actuels qui freinent l’avancée de ses chercheurs. Dans son article, le doctorant Anas Bedraoui met en lumière des réalités aussi complexes que méconnues : des restrictions de visas, des barrières linguistiques et des attentes sociales pesantes.
Un exemple personnel illustre l’ampleur de ces difficultés. En 2023, après l'acceptation de son abstract pour une conférence prestigieuse à Oxford, sa demande de visa a été refusée sans entretien ni explication, bien que son dossier fût complet et conforme aux exigences. Ce refus «arbitraire» n'a pas seulement généré de la frustration ; il a altéré sa motivation et semé un doute durable quant aux démarches futures. Ce récit résonne avec celui de nombreux chercheurs des pays du Sud, notamment du Maroc, pour qui la mobilité académique s’apparente souvent au parcours du combattant.
La barrière linguistique et le piège des journaux prédateurs
À cela s’ajoute la menace des journaux prédateurs, ces publications frauduleuses qui exploitent les chercheurs en leur proposant des articles sans réelle évaluation par les pairs, en imposant des frais exorbitants. Dans son article, Bedraoui témoigne de la prolifération de ces pratiques trompeuses : chaque semaine, il reçoit des invitations à publier dans des journaux à l’impact faible voire douteux ou à participer à des conférences coûteuses en tant que «conférencier principal», mais uniquement après paiement. De nombreux lecteurs internationaux, dont Hugues Abriel, vice-recteur de la recherche et de l’innovation et professeur de médecine moléculaire à l’Université de Bern en Suisse, attestent dans un commentaire que ces révélations ont éveillé un choc. Ces pratiques portent atteinte à la crédibilité des chercheurs et entravent leur intégration dans la communauté scientifique internationale.
Les pressions culturelles et l’équilibre précaire
Les contraintes sociétales, telles qu’elles sont citées dans cet article, se définissent plus comme des contraintes financières, incitant de nombreux chercheurs à abandonner le secteur académique pour des carrières mieux rémunérées.
Des investissements pour limiter la fuite des cerveaux
Les chercheurs marocains qui quittaient autrefois le pays pour ne plus revenir occupent désormais des postes stratégiques dans les universités nationales. Animés par une volonté de partage, ils apportent avec eux un réseau international et une expertise qui enrichissent la scène académique marocaine. Plutôt que de céder aux sirènes de s’installer ailleurs, accentuant le phénomène de la fuite des cerveaux, une nouvelle génération choisit de partir pour mieux revenir, riche d’une expérience diversifiée et désireuse de contribuer à la prospérité de son pays.
Un financement, une thèse ?
Un micro tendu (à moitié) aux doctorants marocains : satisfaction et lacunes
Un témoignage fidèle et une invitation à la réflexion
Malgré l’unidimensionnalité de cet article, l’auteur a tenté avec fidélité, à travers ses propres expériences, de mettre en lumière les principaux défis auxquels les doctorants marocains sont confrontés, freinant leur positionnement dans la communauté scientifique internationale. Ce travail mené par Anas Bedraoui, conclut sur une note d’optimisme, devrait inciter davantage de doctorants à exprimer leurs points de vue, à partager leurs réalités et à contribuer à une réflexion collective pour une meilleure représentation et intégration au sein de cette communauté.
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Mots Clés : Doctorat|Maroc|Anas Bedraoui|Jeunes chercheurs|Barrière linguistique|Journaux prédateurs|Financement|Innovation .