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Développement des compétences dans le privé : la piqûre de rappel de Younes Sekkouri

Réunis au siège de la CGEM, le ministre Younes Sekkouri et les fédérations patronales ont consacré une longue séance de travail aux questions de la formation et au programme Tadaroj. Avec en toile de fond le phénomène de déperdition scolaire qui touche 280.000 jeunes chaque année, le gouvernement veut faire des entreprises un véritable levier de formation, en multipliant les centres intra-entreprises et en mobilisant une enveloppe de 800 millions de dirhams.

Autour de la grande table de réunion de la CGEM, le silence s’installe lorsque Younes Sekkouri prend la parole. Vendredi après-midi, au siège de la confédération, ce n’est pas une simple visite de courtoisie, mais une séance de travail voulue par le ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences.

Face à lui, les représentants des fédérations du textile, de l’immobilier, du tourisme, de l’automobile et bien d’autres ont pris place. Le ministre ouvre la séance, plante le cadre, puis passe l’essentiel du temps à écouter, carnet de notes à la main, les retours de chaque secteur, avant de fixer un cap très concret.

Un diagnostic chiffré porté par la CGEM
C’est Chakib Alj qui donne d’abord le ton. Le président de la CGEM rappelle d’emblée que l’apprentissage est, pour le patronat, un levier central. «L’apprentissage est l’un des leviers les plus efficaces pour préparer une main-d’œuvre professionnelle, employable et compétitive», a-t-il souligné, insistant sur le rôle structurant de l’entreprise dans la montée en compétences des jeunes.

Derrière le principe, les chiffres montrent l’urgence. «Entre 2020 et 2024, la formation en milieu professionnel a chuté de 20% en passant de 119.000 à 88.600 jeunes, l’alternance a reculé de 30% et l’apprentissage de 7%», rappelle Chakib Alj. Pour lui, ces baisses traduisent un système encore trop rigide, avec des «formations souvent standardisées» et des dispositifs mal connus par un tissu économique composé à plus de 95% de très petites et moyennes entreprises. Face au ministre, le président de la CGEM défend un modèle plus souple.

«La flexibilité doit devenir la règle», a-t-il martelé, en plaidant pour un cadre juridique unifié qui fusionne les textes existants.

Le patronat réclame par ailleurs des centres associatifs plurisectoriels plus proches du terrain et des partenariats sectoriels clairs entre l’État, les fédérations et les entreprises. La confédération met aussi en avant la revalorisation des mécanismes de soutien aux entreprises formatrices, l’augmentation des indemnités pour les formateurs et la prise en charge d’une partie des équipements. Autant de «bonnes initiatives» selon Chakib El Alj qui souligne que ces dernières doivent aller encore plus loin.

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Un apprentissage recentré sur l’entreprise
Lorsque le ministre reprend la parole, il déroule la philosophie de Tadaroj, ce programme national d’apprentissage lancé fin octobre. «Nous avons réfléchi et pensé ce programme pendant quelques mois, dans le cadre d’une dynamique composée de plusieurs initiatives», a expliqué le ministre.

Tadarouj vise un public large, des jeunes qui ont quitté l’école à différents niveaux et qui n’ont «aucun moyen de se rattraper» dans les schémas classiques. Le constat est sans appel. «Nous avons une déperdition scolaire de 280.000 personnes par an», a expliqué Younes Sekkouri, en rappelant qu’en face, la formation scolaire par apprentissage ne concerne qu’environ 20.000 personnes chaque année. «Quand vous comparez au stock, vous comprenez tout de suite qu’on est en face d’une crise à grande échelle», a-t-il dit, tout en soulignant que cette situation dure «depuis le début des années 2000». D’où la décision gouvernementale «de passer à 100.000 stagiaires par an».

Dans cette équation, les entreprises sont au centre de cette ambition. Le premier objectif du ministre est clair : mobiliser la CGEM à travers les fédérations pour pouvoir accueillir avant d’insérer les jeunes qui vont faire l’apprentissage. Le second est plus structurel, la création des centres de formation par apprentissage, notamment intra-entreprises.

Younes Sekkouri rappelle que 57 structures de ce type sont déjà opérationnelles et que l’ambition est de former 50.000 personnes sur la période 2025–2026, pour un budget global de 800 millions de dirhams. «Nous avons recensé quelque chose comme 200 métiers», a-t-il expliqué, en ouvrant la porte à des ajustements.

Si certains métiers clés ne figurent pas encore dans la nomenclature, le ministre se dit «prêt à signer des arrêtés pour les intégrer en fonction des besoins du secteur privé», a-t-il dit, tout en soulignant sa volonté d’adapter l’offre de formation aux réalités de chaque filière.

Un calendrier serré
Au fil des interventions, les représentants des fédérations du textile, de l’immobilier, du tourisme, de l’automobile ou encore des services prennent la parole les uns après les autres. Le ministre laisse chaque secteur détailler ses besoins en profils, ses difficultés à trouver des jeunes formés et ses propositions pour structurer des centres de formation en propre ou en partenariat.

La CGEM rappelle avoir déjà transmis au ministère une vision cible pour la formation continue et consolidé les remontées de ses fédérations en vue de la réforme du Code du travail.

Younes Sekkouri inscrit d’ailleurs l’apprentissage dans un ensemble plus large de réformes. Il rappelle la récente adoption de la loi sur la grève, attendue depuis 62 ans, saluée comme une loi «très équilibrée qui protège d’abord les libertés et organise un certain nombre de pratiques», et annonce l’ouverture d’un chantier sur le Code du travail pour l’adapter au Maroc de 2025 et aux nouveaux métiers.

«Nous allons démarrer une consultation pour aboutir à une évolution partielle, mais confortable du Code du travail», a expliqué le ministre, en soulignant que cette modernisation devra concilier compétitivité des entreprises et protection des travailleurs.

Sur la formation professionnelle continue, il évoque également une décision déjà prise par le gouvernement afin de «gérer les choses de façon intelligente» entre prestataires et financeurs, avec un système plus simple, plus efficace, aligné sur les propositions des partenaires économiques. Là encore, le message est adressé aux entreprises qui n’ont pas les moyens d’assurer seules la montée en compétences de leurs équipes, notamment parmi les petites et moyennes structures.

La réunion se clôt sur un engagement très opérationnel. Le ministre fixe un délai de vingt jours pour arrêter, avec la CGEM, la liste des entreprises prêtes à ouvrir ou à renforcer un centre de formation intra-entreprise, les métiers prioritaires à intégrer dans Tadaroj et les volumes de jeunes à accueillir par secteur.

«L’idée est que les secteurs commencent à travailler, avec des objectifs précis et des choses simples», a-t-il expliqué.

Lorsque la séance se termine, en début de soirée, les dossiers restent ouverts, mais la feuille de route se précise. Entre la mobilisation des fédérations, la mise à niveau des cadres juridiques et l’enveloppe annoncée pour les centres de formation intra-entreprises, le ministre aura surtout pris le temps d’écouter et de pousser les entreprises à se projeter, pour transformer l’apprentissage en véritable levier de compétitivité et de mobilité sociale.

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Mots Clés : Déperdition scolaire|  Formation professionnelle|  Apprentissage | Tadaroj | CGEM|  Entreprises | Compétences|  Centres intra-entreprises.


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